mardi 1 mars 2011

Le Chien

Connaissez-vous Riquet ? (J’entends le chien d’Anatole France)
Si vous êtes surs de bien le connaitre, arrêtez ici votre lecture.

Voici le récit de la première rencontre de Riquet et son maitre, tel que vous pourriez le lire dans L’anneau d’améthyste :

« Un matin, comme M. Bergeret, assis devant sa table, près de la fenêtre sur laquelle tremblaient les feuilles du platane, recherchait comment les vaisseaux d’Enée avaient été changés en nymphes, il entendit gratter à la porte et vit tout aussitôt la vieille servante qui portait sur son ventre, comme une sarigue, un nourrisson dont la tête noire sortait du tablier troussé en manière de poche. Elle resta un moment immobile, avec un air d’inquiétude et d’espérance, puis elle posa le petit être sur le tapis aux pieds du maitre.
--Qu’est-ce que c’est que ça ? demanda M. Bergeret.
C’était un petit chien de race incertaine, qui tenait du terrier, avec une jolie tête, bien coiffé, le poil ras, couleur feu très sombre, et un bout de queue de rien du tout. Il avait le corps encore mou des petits, et il allait, flairant sur le tapis.
--Angélique, dit M. Bergeret, portez cette bête à ses maitres.
--Monsieur, elle n’en a pas, répondit Angélique.
M. Bergeret regarda en silence le petit chien qui était venu sentir ses pantoufles et qui reniflait agréablement. M. Bergeret était philologue. C’est peut-être pourquoi il fit, dan ces conjonctures, cette vaine question :
--Comment s’appelle-t-il ?
--Monsieur, répondit Angélique, il n’a pas de nom.
M. Bergeret parut contrarié de cette réponse. Il regarda le chien d’un air de tristesse et de découragement.
Alors le chien posa ses deux pattes de devant sur la pantoufle de M. Bergeret et, la tenant ainsi embrassée, il en mordilla la pointe avec innocence. M. Bergeret, soudain attendri, prit sur ses genoux le petit être sans nom. Le chien le regarda. Et M. Bergeret fut ému par ce regard confiant.
--Le bel œil ! dit-il.
Il est vrai que ce chien avait de beaux yeux, des prunelles marron avec des lueurs dorées, dans une amande d’un blanc chaud. Et le regard de ces yeux exprimait des idées simples et mystérieuses, qu’on sentait communes aux animaux pensifs et aux êtres simples qui vivent sur la terre.
Mais fatigué, peut-être, de l’effort intellectuel qu’il venait de faire pour communiquer avec l’homme, il ferma ses beaux yeux et découvrit, dans un large bâillement, sa gueule rose, sa langue en volute et l’armée de ses dents éclatantes.
M. Bergeret lui mit la main dans la gueule. Le petit chien lui lécha la main. Et la vieille Angélique, rassurée, sourit. »

« Comment s’appelle-t-il ? » avait demandé M. Bergeret.
Un peu plus tard, après quelques échanges philosophiques qui endormirent le petit chien,

« M. Bergeret, revenant à l’idée qui l’avait d’abord occupé, dit à la servante :
--Il faut lui donner un nom.
Elle répondit en riant, les mains sur le ventre, que ce n’était pas difficile.
Sur quoi M. Bergeret fit intérieurement cette réflexion que tout est simple aux simples, mais que les esprits avisés qui considèrent les choses sous des aspects divers et multiples, invisibles au vulgaire, éprouvent une grande difficulté à se décider même dans les moindres affaires. Et il chercha un nom qui pût convenir à cette petite chose animée qui, dans le moment mordillait la frange du tapis.
--Tous les noms de chien, pensa-t-il, conservés dans les traités de nos vieux veneurs, comme du Fouilloux, et dans les vers de nos poètes agrestes, comme La Fontaine, Finaud, Miraut, Briffaut, Ravaud, désignent des chiens de chasse, la noblesse du chenil, la chevalerie de la canaille. Le chien d’Ulysse s’appelait Argos. Il était chasseur aussi. Homère nous l’apprend. « En sa jeunesse, il chassait les petits lièvres d’Ithaque. Mais il était vieux et ne chassait plus. » Il nous faut tout autre chose ici. Les noms que les vieilles demoiselles ont coutume de donner à leur toutou conviendraient mieux, s’ils n’étaient généralement prétentieux et laids. Azor est ridicule.
Ainsi songeait M. Bergeret et il rappelait dans son esprit beaucoup de noms de chiens sans en trouver un seul qui lui fût plaisant. Il pensa en inventer un, mais il n’avait pas d’imagination.
Enfin :
--En quel jour sommes-nous ? demanda-t-il.
--Le neuf, répondit Angélique, le jeudi neuf.
--Eh bien ! dit M. Bergeret, ne pouvons-nous nommer  ce chien Jeudi, comme Robinson appela son nègre Vendredi, pour une raison semblable ?
--Comme il plaira à monsieur, dit Angélique ; mais ce n’est guère joli.
--Alors, dit M. Bergeret, trouvez vous-même un nom à votre créature ; Car enfin, c’est vous qui l’avez introduit ici, ce chien.
--Oh ! moi, dit la servante, je ne saurais trouver un nom. Je n’ai pas assez d’eprit. Quand je l’ai vu sur la paille, dans la cuisine, je l’ai appelé Riquet ; et il est venu jouer dans mes jupes.
--Vous l’avez appelé Riquet ! s’écria M. Bergeret. Que ne le disiez-vous ! Il est Riquet, il restera Riquet. »

QUELQUES LIENS VERS DES SITES QUI VOUS PARLERONT DE RIQUET


Que vous dire d’autre ?
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EMPLACEMENT DE LA PHOTO QUE RIQUET M’A PROMISE

En attendant, voici un chien qui ne ressemble pas à Riquet


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