lundi 9 mai 2011

Journal de Zoé : Souvenirs?

Lundi 9 Mai 2011

Suite de la lettre de « tante Jeanne » qui peine à expliquer ses incohérences précédentes et qui n’y parvient pas vraiment.

J’ai pu être incohérente dans ma première lettre ; je crois, par exemple, avoir utilisé le mot « frères » pour parler des liens entre Paul et Gaby ; s’ils ne l’étaient pas pour les services d’identité, ils ont, jusqu’à leur rupture, défini ainsi leur attachement ; il y a là toute une histoire, leur rencontre, la protection apporté par Paul au petit Gaby(n’oublions pas les sept ans d’écart), que je te conterai peut-être un jour, de vive voix, si tu décides de venir me voir. Tu as pu me prendre pour un imposteur ou une mythomane.
Tu nous appelais réellement « tonton et tantine » en ce temps-là et qu’importe que les liens  du sang n’aient jamais existé.
J’ai surement commis une autre erreur, une erreur que Gaby et moi avons faite toute notre vie, une erreur qui peut, si vous l’avez remarquée, vous avoir fait croire à de l’affabulation ; je pense avoir dit que Gabriel et moi étions à l’Ecole Normale en 43 ce qui est impossible, Pétain l’ayant supprimée des 1940. Eh bien, cela je l’ai dit parce que j’y croyais, j’y ai cru fermement, et Gabriel aussi, durant des années ; ce n’est qu’aujourd’hui, parce que j’essaie de me remémorer le contenu de ma lettre précédente, ce qui m’oblige à un effort intellectuel que je néglige habituellement—habituée à dire « Nous étions à l’Ecole normale en 1943 », je le rabâche  sans réflexion ». En réalité, nous avons fait un stage à l’Ecole Normale rétablie après la Libération et, par un effet que je m’explique mal, nous avons cru de bonne  foi en avoir été les élèves plus tôt, ce qui aurait très probablement été le cas si le monde n’était pas devenu fou.

Oui, « ma tante », oui, la mémoire nous joue tous les tours imaginables, comme par exemple ce pauvre Lucien qui croit maintenant m’avoir poussée dans un torrent et dont je me demande s’il ne vient pas tout juste de « se faire suggérer » cet ancien souvenir… Là, j’exagère peut-être.

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